LA QUESTION : Ne sommes nous pas en pleine situation de panique ?
« La panique – dont le nom vient de ces moutons que le dieu Pan s’amusait à effrayer – est toujours liée à une peur hyperbolique et incontrôlable.
Dans la panique, il est trop tard pour agir. »
La conscience d’une fragilité de la vie
« D’un côté, il est clair qu’on ne veut plus entendre collectivement cette fragilité.
Cela explique qu’on laisse notre système de santé se délabrer sans broncher depuis quinze ans.
D’un autre côté, nous n’avons jamais été aussi sensibles à la fragilité de « notre » vie : l’attention à soi, le souci de soi, la préservation par chacun de sa santé, sont très fortes. »
L’impossibilité de hiérarchiser les catastrophes
« Comme dit Hume, il n’est pas contraire à la raison de préférer la destruction du monde à une égratignure à son doigt.
Cet égoïsme rationnel est monstrueux, mais il est très présent aujourd’hui.
Il faut prendre en compte le fait qu’il y a de vraies catastrophes, comme la guerre en Syrie. La moitié d’un peuple déplacé, bombardé par son propre pouvoir…
Sans parler du réchauffement climatique.
À côté, le coronavirus me paraît être aujourd’hui une petite catastrophe.
Le vrai danger, ce n’est pas tant la fascination pour la catastrophe que de ne plus être capable de hiérarchiser les catastrophes.«
La mise en fragilité de nos valeurs
« Plutôt que de parler de la fragilité de la vie, qui risque de nous faire tourner en rond, je préfère évoquer la fragilité de nos valeurs, qui devrait faire l’objet de toute notre attention : la démocratie, la justice, la liberté, la solidarité, les systèmes de santé et d’éducation…«
Une violence sur les fondements même de notre humanité
« Dans cette crise, il n’y a pas qu’une violence sur les libertés publiques, il y a aussi une violence sur les fondements de notre humanité.
Il est très important de ne pas mettre la vie au-dessus de tout, comme le font les survivalistes.
Il y a des valeurs au-dessus de la vie qui conditionnent une vie proprement humaine.
La proximité avec les plus fragiles et le devoir de visite aux malades sont fondamentaux. Ils ne sont pas qu’évangéliques, ils sont universels.
Comment se remet-on de ne pas avoir assisté aux funérailles d’une personne aimée ? De ne pas avoir dit adieu à un proche ? »
La « SOLUTION » ?
« Il n’est pas interdit de renouer avec la grande indifférence stoïcienne, dont il existe une version athée et une version chrétienne …
Elle consiste à ne pas s’inquiéter de tout ce qui ne dépend pas de soi.
C’est la solution que conseillait Mérimée à Stendhal qui, en 1832, lui demandait quoi faire devant l’épidémie de choléra en Italie. Mérimée lui répond :
1. tu te laves les mains.
2. tu t’en fous complètement. »
Les Citations entre guillemets sont de Pierre ZAOUI, philosophe. (Extraits Interview Journal « La Croix » – 17 mars 2020)
VOIR AUSI : La Tour de Babel …