Aujourd’hui, parler « Réveillon » nous renvoie immanquablement au soir de la Saint Sylvestre, le 31 décembre.
Mais si le « Réveillon » relève bien d’une tradition typiquement française, sa pratique dans le passé ne se limitait pas à ce que nous connaissons actuellement mais s’égrenait allègrement tout au long de l’année !
Ancienne organisation des repas du quotidien
Sous l’Ancien Régime, le calendrier liturgique en vigueur, imposait pour tous, tout au long de l’année, une succession de « jours gras » et de « jours maigres ».
Suite normale des jours
- au réveil, on prenait le déjeuner (rupture du jeûne)
- à 14-15 h, on prenait le dîner
- au soir, on prenait le souper
Passage d’un « jour maigre » à un « jour gras »
- dès minuit, on prenait le « réveillon » (veillons à nouveau!) ou « médianoche »
- le déjeuner était repoussé à 12-13 heures (précurseur du brunch ?)
- Le dîner était repoussé à l’heure du souper
- le souper était repoussé à 22 heures
Le lendemain, on repassait au schéma normal : déjeuner au réveil, dîner à 12-13 heures, souper en soirée.
le « Réveillon » tout au long de l’année
Le « médianoche » (milieu de la nuit), ou « réveillon », était le repas riche en viande pris à minuit pour fêter le passage d’un jour maigre à un jour gras. Il n’était ni rare ni réservé à la fin de l’année, car le calendrier liturgique imposait de très nombreux jours maigres. À la cour de Louis XIV, le « réveillon » était même un divertissement très prisé.
Evidemment ces réveillons n’étaient pas de même nature suivant qu’on faisait partie de l’aristocratie ou du « bas-peuple » !
Il y avait donc « réveillons » et « Réveillons » !
Et sans nul doute, nos « Saint Sylvestre » modernes essaient de se rapprocher plutôt du « Réveillon » d’antan !
Au fil de l’Histoire, on peut grosso modo distinguer deux styles, avec un passage progressif de l’un à l’autre …
Le « service à la française », du Moyen Age jusqu’à Napoléon III dans les dîners officiels
C’était une véritable chorégraphie, un ballet de domestiques apportant les plats : d’abord les entrées et les « potages », des soupes ou ragoûts cuits dans un « pot », puis les « rôts », les viandes rôties, jusqu’au final du « fruit ».
Les repas d’exception comptent jusqu’à huit services !
Chaque convive pioche dans les plats à sa portée, à la main, ou à l’aide d’un couteau ou d’une petite fourche que l’on ne porte pas encore à la bouche.
Et il boit dans un gobelet, présenté sur un plateau par un domestique.
Et puis, la « vaisselle » devint la vaisselle …
L’assiette fait son apparition à la Renaissance, la fourchette à la cour d’Henri III, mais elle n’est vraiment adoptée qu’au milieu du XVIIIe siècle.
Les forêts de verre, elles, ne fleuriront sur nos tables de fête qu’au XIXe siècle !
Si la notion de service de table émerge à la Renaissance, il s’agit davantage de pièces d’apparat pas toujours utilitaires.
Quant à la nef orfévrée, luxueuse, elle abrite la serviette humide avec laquelle le roi se lave les mains. Cet objet, en forme de vaisseau, va donner notre mot « vaisselle ».
Le « service à la russe » après Napoléon III
Le « service à la française » perdure durant des siècles (jusque sous Napoléon III pour les repas officiels) mais se voit progressivement remplacé par le « service à la russe », où tous les convives mangent les mêmes mets au même moment car apportés les uns après les autres.
Avec l’industrialisation, les services de table et l’orfèvrerie deviennent accessibles à une population élargie. La salle à manger gagne les intérieurs bourgeois.
Evolution des goûts au fil des siècles
La France pratique une cuisine européenne très épicée, acidulée. On boit du vin blanc ou clairet, servi frais.
À la Renaissance, le sucre envahit tout, même les viandes et les légumes.
Ce n’est qu’au XVIIe siècle que la gastronomie française s’affirme avec un goût prononcé pour le beurre, le déclin des épices au profit du bouquet garni. Jean-Baptiste La Quintinie, au Potager du roi, développe la culture des fruits et légumes.
Au XVIIIème siècle le thé, le café et le chocolat sont à la mode.
La littérature gastronomique se développe et les nouvelles recettes élaborées à la cour sont aussitôt reprises par les premiers traiteurs parisiens.
Sources : Journal « La Croix » du 21/12/2020
Exposition sur l’art de la table au Musée national de Sèvres
(Viviane Mesqui, Commissaire de l’exposition)